JORF n° 216 du 16 septembre 2021

Décrets, arrêtés, circulaires

Textes généraux

Ministère de la justice

Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2021-1193 du 15 septembre 2021 portant modification du livre VI du code de commerce

Monsieur le Président de la République,

La présente ordonnance est prise en application de l'article 60, plus particulièrement son 14°, et de l'article 196 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (dite loi « PACTE »). Le délai d'habilitation initialement prévu pour une durée de deux ans par ces textes a été prolongé de quatre mois par l'article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19. Ces deux habilitations conduisent, d'une part, à modifier les dispositions du livre VI du code de commerce relatives aux sûretés et aux créanciers titulaires de sûretés et, d'autre part, à adopter les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour transposer la directive (UE) 2019/1023 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 relative aux cadres de restructuration préventive, à la remise de dettes et aux déchéances, et aux mesures à prendre pour augmenter l'efficacité des procédures en matière de restructuration, d'insolvabilité et de remise de dettes, et modifiant la directive (UE) 2017/1132 (directive dite « restructuration et insolvabilité »).

L'élaboration de ces dispositions a donné lieu à une large concertation. Deux consultations publiques ont ainsi été successivement ouvertes. La première, au début de l'été 2019, portait sur deux questionnaires mis en ligne sur le site internet du ministère de la justice. La seconde consultation, ouverte le 4 janvier dernier, présentait des propositions d'orientations et des projets d'écritures. Elle était également mise en ligne sur internet.

Les dispositions précitées de la loi PACTE ayant un rapport étroit, il est apparu cohérent de regrouper en une seule ordonnance les textes rédigés sur le fondement de ces deux habilitations qui définissent plusieurs objectifs pris en compte de manière combinée.

La réforme du droit des sûretés, dans son volet relatif à l'articulation avec le droit des entreprises en difficulté, s'inscrit d'abord dans un triple objectif, de simplification du droit des sûretés, de renforcement de son efficacité et de préservation de l'équilibre entre les intérêts en présence. La modification par l'ordonnance du livre VI du code de commerce améliore la lisibilité des droits des créanciers titulaires de sûretés en procédure collective et assure notamment l'efficacité des sûretés consacrées par l'ordonnance portant modification du droit des sûretés : la cession de créance et la cession de sommes d'argent, à titre de garantie. L'attractivité du droit français est ainsi renforcée et, les sûretés étant essentielles au crédit, le financement des entreprises facilité.

La réforme du droit des sûretés doit également satisfaire un objectif général d'équilibre. Il s'agit plus précisément d'assurer un équilibre entre les intérêts des créanciers et ceux des débiteurs et des garants. Lorsqu'elle est encore possible, la restructuration de l'entreprise en difficulté doit être favorisée, ce qui nécessite d'appliquer un principe de suspension des poursuites pendant une certaine durée, avec des dérogations limitées et encadrées. Le législateur a également marqué le souhait de mieux protéger les garants du débiteur en difficulté, en particulier les garants personnes physiques.

Rendre plus lisibles les droits des créanciers titulaires de sûretés est d'autant plus nécessaire que la directive « restructuration et insolvabilité » exige des Etats membres qu'ils offrent aux débiteurs la possibilité d'utiliser au moins une procédure de restructuration préventive, dont l'économie dépend d'une meilleure prise en compte des droits des créanciers et de leur rang. Avec la transposition de cette directive, les créanciers, répartis en classes sont appelés à voter sur le projet de plan de restructuration ; en cas de divergence entre les classes, qui peuvent être comparées à des collèges électoraux organisés en fonction de critères économiques, la réforme assure aux créanciers garantis une réelle sécurité juridique qui résulte du respect de leurs garanties. En outre, en présence de créanciers ayant voté contre le projet de plan, ce dernier doit désormais respecter un critère dit du « meilleur intérêt des créanciers ». Ce critère vise à apprécier les droits des différents créanciers affectés par le projet de plan de restructuration en imposant que le sort qui leur est réservé par le plan ne soit pas plus défavorable que celui qu'ils connaîtraient si l'entreprise faisait l'objet d'une liquidation, ou faisait l'objet d'un plan de cession, ou encore dans l'hypothèse de la meilleure solution alternative si le plan n'était pas validé. Le nouveau cadre de restructuration préventive s'appuie ainsi sur l'efficacité réelle des sûretés dont bénéficient les créanciers et contribue à renforcer la prévisibilité du risque accepté par les partenaires financiers de l'entreprise ainsi qu'à réduire l'incertitude générée par les difficultés d'une entreprise.

La clarification du classement des créances garanties opérée en conséquence est conforme aux conclusions du rapport remis au Premier ministre le 21 avril 2021 par M. René Ricol sur l'articulation entre le régime de garantie des salaires (AGS) et les administrateurs et mandataires judiciaires dans le cadre des procédures collectives.

Le cadre de restructuration préventive prévu par la directive est également conçu comme un moyen de prévenir l'accumulation des prêts dits non performants, ainsi nommés parce qu'ayant une probabilité de ne pas être remboursés ou de connaître un retard de paiement important.

Il a aussi pour objet de permettre aux entreprises de poursuivre leur activité et de prévenir les suppressions d'emplois et les pertes de savoir-faire (considérant 2 de la directive).

Les enjeux d'attractivité de la transposition sont donc particulièrement forts, tant pour les créanciers que pour les entreprises (les débiteurs).

Les enjeux de respect équilibré des intérêts en cause le sont tout autant.

La directive souligne d'ailleurs l'importance de ces équilibres. Elle comprend, dans le même esprit, d'autres mesures favorisant l'activité économique, parmi lesquelles la consécration, sur un plan européen, d'un droit à une seconde chance des entrepreneurs individuels honnêtes, insolvables. Le droit français organisant déjà des procédures rapides et adaptées pour traiter les difficultés des entrepreneurs et entreprises en situation irrémédiablement compromise, les modifications apportées par l'ordonnance sont donc limitées à cet égard.

La richesse de ces lignes directrices, qui s'imposent à l'ensemble des Etats membres, doit contribuer à améliorer la libre circulation des capitaux, conforter la liberté d'établissement et renforcer le bon fonctionnement du marché intérieur.

Enfin, la transposition de la directive a été préparée dans le respect des engagements du traité d'intégration et de coopération franco-allemand, signé le 22 janvier 2019 à Aix-la-Chapelle, par lequel la République française et la République fédérale d'Allemagne se sont engagées notamment à se coordonner sur la transposition du droit européen et à rapprocher leurs législations dans le droit des affaires. Des échanges bilatéraux réguliers entre les services chargés, tant en France qu'en Allemagne, de rédiger les textes de transposition ont permis de favoriser la bonne compréhension et l'intégration en droit français du mécanisme de classes des créanciers inspiré du droit allemand et, inversement, de faire connaître à notre partenaire allemand les dispositifs français de prévention des difficultés des entreprises dont l'efficacité est reconnue.

La directive ouvrant de nombreuses options de transposition aux Etats membres, sa transposition peut se faire en conservant les atouts forts du droit français des entreprises en difficulté et la diversité des outils mis à la disposition des praticiens et des entreprises. Des choix, conformes aux principes de ce droit, ont pu être faits dans le respect du droit européen. C'est le cas, notamment, de la préservation des créances résultant du contrat de travail qui ont été exclues du plan de restructuration afin d'éviter qu'elles ne soient affectées par ce plan. Ceci permet d'atteindre pleinement l'objectif de préservation des droits des travailleurs, affirmé par la directive. Plus généralement, la transposition n'a pas conduit à une remise en cause de l'organisation du livre VI du code de commerce, ce qui facilitera l'appropriation de la réforme par les praticiens.

L'ordonnance suit le plan du livre VI du code de commerce et son titre premier est organisé en six chapitres, correspondant à chaque titre modifié de ce livre VI, complétés par un chapitre VII relatif aux dispositions particulières aux procédures d'insolvabilité relevant du règlement (UE) n° 2015/848 du 20 mai 2015 (article 70 de l'ordonnance). Son titre second est consacré aux dispositions diverses et finales.

La double habilitation sur laquelle elle repose invite toutefois à présenter séparément et dans un premier temps les dispositions de l'ordonnance modifiant le livre VI relatives aux sûretés (I), certaines de ces dispositions étant nécessaires pour une transposition efficace de la directive (UE) 2019/1023 (II). L'architecture générale de la transposition de cette directive sera ainsi présentée dans la seconde partie de ce rapport.

I. - Modifier les règles du livre VI du code de commerce relatives aux sûretés

Le 14° de l'article 60 de la loi PACTE autorise le Gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour « simplifier, clarifier et moderniser les règles relatives aux sûretés et aux créanciers titulaires de sûretés dans le livre VI du code de commerce, en particulier dans les différentes procédures collectives, notamment en adaptant les règles relatives aux sûretés au regard de la nullité de certains actes prévue au chapitre II du titre III du même livre VI, en améliorant la cohérence des règles applicables aux garants personnes physiques en cas de procédure collective et en prévoyant les conditions permettant d'inciter les personnes à consentir un nouvel apport de trésorerie au profit d'un débiteur faisant l'objet d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire avec poursuite d'activité ou bénéficiant d'un plan de sauvegarde ou de redressement arrêté par le tribunal ». L'objectif de meilleure lisibilité du droit des sûretés est également pris en compte, en application de l'habilitation à transposer la directive « restructuration et insolvabilité » qui oblige les Etats membres à prévoir une organisation des créanciers en classes en distinguant, au minimum, les créanciers garantis et les créanciers non garantis.

La modification des règles relatives aux sûretés dans le livre VI du code de commerce concerne, tout d'abord, leur traitement avant l'ouverture de la procédure collective. Le sort des sûretés après l'ouverture de la procédure collective est abordé dans un second temps.

Les sûretés avant l'ouverture de la procédure collective :

Sur le fondement de l'article 60 de la loi PACTE, l'ordonnance améliore le sort du garant - personne physique ou personne morale - du débiteur dans le cadre de la procédure de conciliation. L'article 7 lui permet ainsi de bénéficier plus largement des délais de grâce octroyés par le juge au débiteur. Elle apporte, par ailleurs, plus de prévisibilité pour les parties à l'accord de conciliation, qui pourront y préciser notamment le sort des garanties prises dans ce cadre, en cas de caducité ou de résolution, dans les limites strictement fixées par l'article 8 de l'ordonnance et sans pouvoir déroger aux dispositions d'ordre public du livre VI du code de commerce en cas d'ouverture d'une procédure collective, dont celles relatives à la date de la cessation des paiements qui détermine la durée de la période suspecte.

L'article 50 de l'ordonnance modernise, s'agissant de la période suspecte, le régime des nullités dites de plein droit afin d'améliorer la protection du gage commun des créanciers. Le 6° de l'article L. 632-1 du code de commerce est modifié afin, d'une part, de soumettre à ces nullités l'ensemble des sûretés réelles conventionnelles et tout droit de rétention conventionnel constitués sur les biens ou droits du débiteur pour dettes antérieurement contractées et, d'autre part, de consacrer la jurisprudence de la Cour de cassation qui autorise, en période suspecte, la substitution de sûretés lorsque la nouvelle sûreté vient remplacer une sûreté antérieure d'une nature et d'une assiette au moins équivalentes. Afin de prendre en compte le régime particulier de la cession de créance prévue à l'article L. 313-23 du code monétaire et financier (« cessions Dailly »), il est fait exception à la nouvelle règle de nullité de plein droit lorsque la cession de créance est intervenue en exécution d'un contrat-cadre conclu antérieurement à la date de cessation des paiements.

Les sûretés après l'ouverture de la procédure collective :

Une fois la procédure collective ouverte, les sûretés sont soumises à un régime juridique propre au droit des entreprises en difficulté afin de prendre en compte les intérêts des différentes parties en présence, que sont les créanciers et le débiteur mais aussi les garants de ce dernier et ce, conformément à l'objectif d'équilibre de l'habilitation. Par ailleurs, l'article 6 de la directive du 20 juin 2019 affirme, pour les procédures de restructuration préventive, la nécessité d'imposer en principe une suspension des poursuites individuelles à tous les types de créances, y compris les créances garanties et les créances privilégiées.

Plusieurs dispositions modifient d'abord le sort des créanciers titulaires de sûretés en période d'observation.

Afin de simplifier et d'améliorer les droits des créanciers, l'article 15 modifie l'article L. 622-7 du code de commerce ; il permet au juge-commissaire d'autoriser la constitution de toute sûreté réelle conventionnelle et il remplace à cette fin l'énumération limitative prévue au 1er alinéa du II de ce dernier article. Le juge-commissaire peut également autoriser le paiement du transporteur en cas d'action directe exercée par celui-ci au titre de l'article L. 132-8 du code de commerce et, après avoir recueilli les observations du ministère public, autoriser le débiteur à exercer le droit prévu à l'article 1699 du code civil relatif au retrait litigieux. Le juge-commissaire dispose ainsi de pouvoirs accrus pour prendre en compte la situation du débiteur et celle des différents créanciers titulaires de sûretés.

L'article 16 remplace l'énumération faite à l'article L. 622-8 du code de commerce, qui prévoit qu'en cas de vente d'un bien grevé d'un privilège spécial, d'un gage, d'un nantissement ou d'une hypothèque au cours de la période d'observation, la quote-part du prix correspondant aux créances garanties est versée en compte de dépôt à la Caisse des dépôts et consignations. Sont désormais désignés plus généralement les biens grevés d'une sûreté réelle spéciale ou d'une hypothèque légale. L'article 34 de l'ordonnance modifie de la même manière l'article L. 626-22 du même code pour prendre en compte le cas où la vente du bien grevé intervient en présence d'un plan de sauvegarde (ou de redressement) arrêté par le tribunal.

L'article 19 modifie l'article L. 622-21 du code de commerce. Une première modification du II de cet article de ce dernier article a pour objet d'étendre la règle de l'arrêt et de l'interdiction des procédures d'exécution qui n'est ainsi plus limitée aux créanciers du débiteur : le bénéficiaire d'une sûreté réelle constituée par ce débiteur en garantie de la dette d'autrui est désormais également concerné par cette règle. Le statut du bénéficiaire de cette sûreté dans la procédure du constituant est précisé par d'autres dispositions de l'ordonnance. Une seconde modification consacre au IV de l'article L. 622-21 l'interdiction, résultant du jugement d'ouverture, de tout accroissement de l'assiette d'une sûreté réelle conventionnelle ou d'un droit de rétention conventionnel, quelle qu'en soit la modalité. A titre d'illustration, ce principe de non-accroissement de l'assiette des sûretés réelles conventionnelles s'applique au nantissement de compte-titres de l'article L. 211-20 du code monétaire et financier, l'accroissement pouvant intervenir par inscription de titres ou de fruits et produits venant compléter les titres nantis. Il est précisé au même IV que toute disposition contraire, portant notamment sur un transfert de biens ou de droits du débiteur non encore nés à la date du jugement d'ouverture, doit être écartée à compter de cette date. L'objectif est notamment de tenir compte de l'abrogation, par l'ordonnance portant réforme du droit des sûretés, du troisième alinéa de l'article 1323 et de l'article 2357 du code civil, portant respectivement sur la cession de créances futures à titre de garantie et le nantissement de créances futures. En droit commun, ces opérations produisent désormais leurs effets immédiatement, dès la date de l'acte de cession ou de nantissement, même si la créance sur laquelle elles portent ne naît qu'ultérieurement. L'application de cette solution en procédure collective serait inopportune et pourrait faire obstacle à la poursuite de l'activité de l'entreprise, privée d'une partie de sa trésorerie. Des exceptions strictes à cette règle de non accroissement de l'assiette sont limitativement prévues.

L'article 20 modifie les conditions de déclaration des sûretés. La déclaration prévue à l'article L. 622-25 du code de commerce doit dorénavant porter sur l'assiette de la sûreté et non plus seulement sur sa nature. Par ailleurs, une obligation de déclaration s'impose au bénéficiaire d'une sûreté réelle conventionnelle constituée sur les biens du débiteur en garantie de la dette d'un tiers. L'article 21 de l'ordonnance, modifiant l'article L. 622-26 du code de commerce, soumet le bénéficiaire de cette garantie à l'obligation de solliciter un relevé de forclusion, à défaut de déclaration régulière dans les délais, ce qui rapproche son statut, à l'égard de la procédure collective, de celui d'un créancier du débiteur, serait-il créancier d'un tiers.

Le même article 21 étend aux sûretés la sanction, prévue par l'article L. 622-26, de l'inopposabilité au débiteur en cas de défaut de déclaration. Le deuxième alinéa du même article ne limite plus la protection dont bénéficient les garants personnes physiques du débiteur à la durée de l'exécution du plan ; il l'étend au-delà de cette exécution, conformément à l'orientation générale définie par l'article 60 de la loi PACTE.

L'amélioration de la protection des garants personnes physiques est, en effet, un objectif de l'habilitation qui prévoit, notamment, d'améliorer la cohérence des règles relatives à ces garants en procédures de sauvegarde et de redressement judiciaire. A cette fin, l'article 43 de l'ordonnance supprime le dernier alinéa de l'article L. 631-14, étendant ainsi au redressement judiciaire l'application du 2e alinéa de l'article L. 622-26 modifié par la présente ordonnance et celle du 1er alinéa de l'article L. 622-28 relatif à l'arrêt du cours des intérêts.

D'autres mesures permettent encore de préserver les droits des garants pour autrui. L'article 23 affirme, dans un nouvel article L. 622-34, la possibilité qui leur est reconnue de procéder, même avant paiement, à la déclaration de leur créance pour la sauvegarde de leur recours personnel. L'article 26, complétant l'article L. 624-3-1 du code de commerce, prévoit qu'en cas de poursuites, ces mêmes garants ne peuvent se voir opposer l'état des créances lorsque la décision d'admission prévue à l'article L. 624-2 ne leur a pas été notifiée. A cet article L. 624-2 modifié, il est toutefois prévu que le juge-commissaire peut désormais déclarer irrecevable une demande d'admission sans pour autant devoir la rejeter dans cette hypothèse (article 25 de l'ordonnance). La caution ne pourra donc pas opposer une décision de rejet alors que le juge n'a pas statué au fond sur la créance déclarée dans la procédure du débiteur principal.

L'article 60 de la loi PACTE invite, par ailleurs, à instituer un nouveau privilège pour apport d'argent frais en procédure collective. Les articles 18, 28, 31, 33, 36 et 62 de l'ordonnance définissent le régime de ce privilège. Il s'applique dans un premier temps aux créances résultant d'un nouvel apport de trésorerie consenti en vue d'assurer la poursuite d'activité pour la durée de la procédure. Ces apports de trésorerie sont autorisés par le juge-commissaire, dans les mêmes conditions que les prêts qui étaient prévus au 2° du III des articles L. 622-17 et L. 641-13 auxquels ils se substituent. Un privilège identique est prévu pour garantir les créances résultant d'un apport de trésorerie correspondant à un engagement mentionné dans le projet de plan, arrêté (article 31) ou modifié (article 36) par le tribunal. En présence de classes de parties affectées constituées, celles-ci seront amenées à se prononcer sur ce dernier apport de trésorerie. Le classement de ces privilèges, qui correspond à celui qui avait été défini de manière temporaire par le IV de l'article 5 de l'ordonnance n° 2020-596 du 20 mai 2020, est précisé par les articles L. 622-17 et L. 643-8 du code de commerce modifiés par les articles 18 et 62 de la présente ordonnance.

Cet article 62, plus généralement, synthétise les règles de classement des créances en liquidation judiciaire. Ce classement, qui laisse subsister, en sauvegarde ou en redressement judiciaire, celui précisé par l'article L. 622-17 du code de commerce, clarifie, sans pouvoir être exhaustif, l'ordre des sûretés en cas de réalisation des actifs du débiteur. Il ne crée pas de droits nouveaux et ne remet pas en cause l'ordre des créances tel qu'il était défini par plusieurs dispositions, notamment celles de l'article L. 641-13 et de l'article L. 643-8 dans leur version antérieure à cette ordonnance. Il ne revient pas sur le principe énoncé d'un droit au paiement à l'échéance pour les créanciers qui échappent à la règle de l'interdiction des paiements énoncée à l'article L. 622-7, ce qui est confirmé par l'ordonnance. Ainsi défini à l'article 643-8 modifié, le classement des créanciers - qu'il s'agisse de créanciers antérieurs, de créanciers postérieurs également soumis à l'interdiction de l'article L. 622-7, ou de créanciers postérieurs à l'ouverture de la procédure collective échappant à cette interdiction mais cependant non payés - ne trouve plus sa place à l'article L. 641-13. L'article 54 de l'ordonnance le modifie en conséquence, en supprimant, par ailleurs, les contraintes inutiles pesant sur certains de ces créanciers.

L'article 62 de l'ordonnance répond ainsi au besoin de clarification exprimé par l'article 60 de la loi PACTE. Ce classement sera également une référence pour la transposition de la directive (UE) 2019/1023. En effet, il contribue à la définition du critère du meilleur intérêt des créanciers qui conditionne pour partie l'application du dispositif de classes de parties affectées décrit dans le II du présent rapport. Au sein d'une nouvelle section 2 du chapitre III du titre IV intitulée « du rang des créances », créée par l'article 61, l'article 62 n'a pas pour objet d'instituer de nouvelles sûretés, et c'est pourquoi il renvoie aux dispositions pertinentes. Tel est le cas, par exemple, du privilège initialement prévu par l'article 2332-4 du code civil et qui est mentionné à l'article L. 624-21 du code commerce créé, ainsi qu'une nouvelle section, par l'article 27 de la présente ordonnance. Ce déplacement se justifie par le champ d'application de cette disposition, dont le fond n'est pas modifié. Il explique pourquoi la date d'entrée en vigueur de cet article 27 doit être coordonnée avec celle de l'ordonnance relative aux sûretés prise conformément à l'habilitation de l'article 60 de la loi PACTE (article 73 de l'ordonnance).

Parmi les autres dispositions de coordination ou de clarification, l'article 57 de l'ordonnance modifie le quatrième alinéa de l'article L. 642-12 du code de commerce afin de préciser qu'en cas de transfert de la charge des sûretés prévu à cet article, si le cessionnaire est tenu des échéances du crédit consenti à l'entreprise pour lui permettre le financement d'un bien sur lequel portent ces sûretés, le débiteur est parallèlement libéré de ces échéances.

II. - Transposer la directive « restructuration et insolvabilité » et mettre en cohérence les procédures du livre VI du code de commerce avec les nouvelles règles

L'article 196 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 autorise le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans des conditions favorisant la poursuite de l'activité, la sauvegarde de l'emploi, l'apurement du passif et le rebond des entrepreneurs honnêtes et permettant la réduction des coûts et des délais des procédures, les mesures, relevant du domaine de la loi, nécessaires pour rendre compatibles les dispositions des livres IV, VI et VIII du code de commerce avec le droit de l'Union européenne.

A cette fin, le Gouvernement est autorisé à :

Remplacer les dispositions relatives à l'adoption des plans de sauvegarde en présence de comités de créanciers par des dispositions relatives à une procédure d'adoption de ces plans par des classes de créanciers ;

Introduire la possibilité pour le tribunal d'arrêter un plan malgré l'opposition d'une ou plusieurs classes de créanciers ;

Préciser les garanties et conditions nécessaires à la mise en œuvre des 1° et 2°, relatives notamment à la protection des intérêts du débiteur, des créanciers et des personnes concernées par les plans de sauvegarde ;

Imposer le respect des accords de subordination conclus avant l'ouverture de la procédure de sauvegarde ;

Aménager les règles relatives à la suspension des poursuites ;

Développer les mesures destinées à favoriser le rebond de l'entrepreneur individuel faisant l'objet de procédures de liquidation judiciaire et de rétablissement professionnel ;

modifier les procédures de sauvegarde et de redressement judiciaire afin de les mettre en cohérence avec les modifications apportées ;

modifier en conséquence les dispositions de nature législative permettant d'assurer la mise en œuvre et de tirer les conséquences des modifications apportées.

L'objectif de la directive (UE) 2019/1023 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 relative aux cadres de restructuration préventive, principalement concernée par cette habilitation, est notamment défini par son premier considérant. Son titre II comporte 16 de ses 36 articles, consacrés aux cadres de restructuration préventive ; ces cadres doivent permettre aux entreprises concernées de poursuivre leur activité et les aider à prévenir la suppression d'emplois. La directive s'attache aussi aux conditions de liquidation rapide des entreprises non viables (3e considérant) et son titre III (articles 20 à 28), intitulé « remise de dettes et déchéances », traite de la possibilité offerte aux entrepreneurs individuels honnêtes de bénéficier d'un droit à une seconde chance en cas d'insolvabilité. L'ensemble de ces éléments convergent donc avec les objectifs définis par l'article 196 de la loi PACTE et, plus généralement, ceux du livre VI du code de commerce.

Le livre VI du code de commerce répond, en effet, déjà à de nombreuses exigences posées par la directive, grâce à la diversité des procédures qu'il prévoit en matière de difficultés des entreprises, tant préventives que curatives. Il n'est donc pas apparu nécessaire de remettre en cause son architecture générale, mais plutôt de garantir la lisibilité du droit en conservant, dans la mesure du possible, les dispositions dont la modification n'est pas utile à la transposition. Le choix, s'agissant des cadres de restructuration préventive, consiste à faire de la procédure de sauvegarde accélérée, organisée par le chapitre VIII du titre II du livre VI, le cadre de restructuration préventif au sens de la directive. En effet, il s'agit d'une procédure fondée sur l'anticipation qui se caractérise par sa rapidité et dans laquelle les créanciers sont appelés à voter, actuellement réunis au sein de comités. Ces caractéristiques facilitent la mise en œuvre des objectifs définis par l'habilitation. Dès lors que la transposition conduit à abandonner la référence aux comités de créanciers, et donc au comité des établissements de crédit, il n'y a plus lieu de dissocier la sauvegarde accélérée et la sauvegarde financière accélérée. La réforme préserve toutefois la possibilité de circonscrire les effets de la procédure aux seuls créanciers financiers lorsque la nature de l'endettement le justifie (article 38). La durée de cette procédure est limitée à quatre mois. Elle est accessible à toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, comme l'avait déjà prévu de manière temporaire l'ordonnance n° 2020-596 du 20 mai 2020 prise pour prévenir les difficultés économiques des entreprises consécutives à la crise sanitaire.

Dans toutes les procédures où ils existent (sauvegarde, sauvegarde accélérée et redressement judiciaire), les comités de créanciers seront remplacés par le système de classes de créanciers et, plus généralement, de parties affectées. La coexistence de ces comités avec les classes de parties affectées prévus par la directive, aurait été source de confusions. Dès lors, l'organisation des classes de parties affectées est prévue dans le cadre de la section 3 du chapitre VI du titre II du livre VI, relative à la sauvegarde (article 37) et il est procédé par renvois et adaptations pour les autres procédures, conformément à l'organisation du livre VI telle que voulue par le législateur en 2005. Les procédures collectives (de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire) dans lesquelles il n'y a pas à mettre en place des classes de parties affectées sont peu modifiées par l'ordonnance.

Ces modifications, les plus innovantes, relatives aux cadres de restructuration préventive avec constitution de classes de parties affectées, seront présentées en premier lieu. Les autres modifications seront exposées par la suite.

II-1. - Le cadre de restructuration préventive (titre II de la directive)

La directive du 26 juin 2019, notamment son titre II, se caractérise par un socle impératif ainsi que par le nombre important d'options laissées aux Etats et donc par une grande diversité de combinaisons possibles pour sa transposition.

Elle prévoit que les débiteurs doivent avoir accès à au moins un cadre de restructuration préventive leur permettant de se restructurer en vue de prévenir l'insolvabilité - qu'elle ne définit cependant pas - et d'assurer leur viabilité (article 4.1 de la directive). Les caractéristiques essentielles du cadre de restructuration préventive sont l'application d'un principe de suspension des poursuites individuelles, l'organisation, avec un certain nombre de dérogations, des créanciers en classes pour leur permettre de voter sur le projet de plan de restructuration et la possibilité pour le tribunal d'arrêter un plan en dépit du vote négatif d'une ou plusieurs classes : il s'agit de ce qui est qualifié « d'application forcée interclasses », ainsi que la référence faite par la directive au critère du « meilleur intérêt ».

Utilisant la liberté laissée aux Etats membres par les article 2 et 9 de la directive, l'ordonnance ne crée pas un cadre rigide pour la constitution des classes de parties affectées. En outre, en dehors de la procédure de sauvegarde accélérée, elle n'impose pas aux petites et moyennes entreprises de mettre en œuvre cette organisation des créanciers.

Les règles générales relatives aux classes de parties affectées

L'article 37 de l'ordonnance reprend l'ensemble des dispositions de la section III du chapitre VI du titre II du livre VI, intitulée « des classes de parties affectées ». Cette terminologie, utilisée par la directive, intègre dans les classes, à côté des créanciers, d'autres parties affectées tels que les actionnaires et autres détenteurs de capital. Cette section comprend les articles L. 626-29 à L. 626-34 du code de commerce.

La section « des classes de parties affectées » s'applique, quelle que soit la taille de l'entreprise concernée, en sauvegarde accélérée et, sous certaines conditions, soit en raison de la taille du débiteur, soit à sa demande, en sauvegarde non accélérée et en redressement judiciaire.

L'article L. 626-29 modifié renvoie à un décret en Conseil d'Etat pour la définition des seuils à partir desquels la constitution de classes est obligatoire - hors la sauvegarde accélérée - tout en permettant aux entreprises qui n'atteignent pas ces seuils de demander au juge-commissaire d'autoriser leur constitution. L'absence de cadre strictement prédéfini permettra à l'administrateur judiciaire d'adapter cette organisation à la nature du passif de l'entreprise. En effet, même si la demande est faite par le débiteur, conformément à la directive (article 9 point 4) la mise en œuvre de la répartition en classes ne peut être faite que par un tel mandataire de justice (III de l'article L. 626-30 modifié).

Le I de l'article L. 626-30 réécrit, prévoit que seules les parties affectées, réparties en classes, se prononcent sur le projet de plan. Constituent des parties affectées celles dont les droits - créances ou intérêts - sont directement affectés, c'est-à-dire susceptibles d'être modifiés d'une manière quelconque par le plan de restructuration. Il a été choisi que les détenteurs de capital soient, le cas échéant, intégrés dans les classes en cette qualité, comme le permet l'article 9 de la directive.

Le II de cet article L. 626-30 impose aux parties affectées de faire connaître l'existence d'éventuels accords de subordination, conclus avant l'ouverture de la procédure, à peine d'inopposabilité à cette dernière, conformément à l'habilitation (4° du I de l'article 196 de la loi). Le considérant 44 de la directive permet en effet de prévoir une ou plusieurs classes de créanciers titulaires de créances subordonnées. Ce choix impose, compte tenu de la durée de la période d'observation, une information rapide de l'administrateur judiciaire.

Le III du même article établit les critères de répartition des créanciers dans les classes. Cette répartition, laissée en partie à l'appréciation de l'administrateur judiciaire sous sa responsabilité, doit se faire sur la base de « critères objectifs vérifiables », ce qui imposera de les exposer, et de l'identification d'une communauté d'intérêts suffisante. Cette notion renvoie à l'idée d'un intérêt catégoriel ; cet intérêt doit être de nature économique. Ces critères sont appréciés en fonction du statut de la créance telle que définie avant la date de l'ouverture de la procédure (voir aussi la nouvelle rédaction de l'article L. 626-30-1, proche de la rédaction antérieure à l'ordonnance à cet égard). Outre ces critères généraux, l'ordonnance prédéfinit un certain nombre de classes, étant précisé qu'il n'est pas prévu de possibilité de regrouper les créanciers en une classe unique et que ne peuvent être concernés que des « parties affectées » déterminées selon le contenu du projet de plan.

Pour la constitution des classes :

doivent être répartis en classes distinctes, d'une part, les créanciers titulaires de sûretés réelles portant sur les biens du débiteur - critère patrimonial connu du droit des procédures collectives - pour leurs créances garanties, et, d'autre part, les autres créanciers ;

les accords de subordination doivent être respectés ;

les détenteurs de capital, s'ils sont affectés, par le projet de plan, sont appelés à voter au sein d'une ou plusieurs classes.

Le 3° de ce III désigne par « détenteurs de capital » les membres de l'assemblée générale extraordinaire ou l'assemblée des associés, des assemblées spéciales mentionnées aux articles L. 225-99 (titulaires d'actions d'une catégorie déterminée) et L. 228-35-6 (titulaires d'actions à dividende prioritaire sans droit de vote) et des assemblées générales des masses visées à l'article L. 228-103 du code de commerce (titulaires de valeurs mobilières donnant accès à terme au capital).

En dehors de ces classes prédéterminées, l'administrateur judiciaire peut constituer d'autres classes, dans le respect des critères généraux énoncés ; ainsi, il pourra regrouper, par exemple, les créanciers publics privilégiés en une ou plusieurs classes, notamment si la composition du passif de l'entreprise le justifie.

Retenant une option offerte par la directive (article 1er [5 a] de la directive), le choix a été fait, au IV de l'article L. 626-30, d'exclure les créances résultant du contrat de travail du plan de restructuration soumis au vote des classes afin de préserver au mieux les droits des travailleurs. Il en résulte que l'association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS), subrogée dans les droits des créanciers bénéficiant d'une avance, n'est pas une partie affectée, ne participe pas aux classes de créanciers et ne peut donc être concernée par une application forcée interclasses. Outre ces créances, sont également exclues du plan les droits à pension acquis au titre d'un régime de retraite professionnelle et les créances alimentaires, afin d'en protéger les bénéficiaires.

L'article 37 de l'ordonnance définit également la procédure que doit respecter l'administrateur judiciaire lors de la répartition des créanciers dans les classes. Le V de l'article L. 626-30 prévoit que l'administrateur soumet à chaque partie affectée les modalités de répartition et de calcul des voix correspondant aux créances ou droits leur permettant d'exprimer un vote. Il ouvre à ces parties, au débiteur, au ministère public et au mandataire judiciaire, dès ce stade, un recours devant le juge-commissaire, recours dont les modalités d'exercice sont précisées par voie réglementaire. Il est, en effet, apparu nécessaire d'apporter à la procédure de vote du projet de plan la sécurité juridique nécessaire le plus rapidement possible. La décision rendue aura l'autorité de chose jugée.

Le vote des classes de parties affectées

L'article L. 626-30-2 du code de commerce, dans sa nouvelle rédaction, définit les conditions dans lesquelles le débiteur, avec le concours de l'administrateur judiciaire, présente aux classes de parties affectées des propositions en vue d'élaborer le projet de plan (article 9 de la directive).

Reprenant les lignes directrices de l'article L. 626-30-2 dans sa rédaction concernant les comités de créanciers, la nouvelle rédaction de cet article prévoit que les classes de parties affectées se prononcent sur le projet de plan dans un délai de vingt à trente jours suivant la transmission des propositions du débiteur, délai pouvant être augmenté ou réduit par le juge-commissaire, dans la limite de quinze jours. En sauvegarde, il n'est pas prévu que les classes puissent présenter un plan concurrent à celui du débiteur, auquel il n'adhèrerait pas, contrairement à ce qui est prévu en redressement judiciaire (article 45) ou à ce qui l'était pour les comités de créanciers.

La décision est prise par chaque classe à la majorité des deux tiers du montant des créances ou des voix détenues par les membres ayant exprimé un vote. Cette règle de majorité s'applique à toutes les parties affectées, y compris, le cas échéant, aux détenteurs de capital, sans condition de quorum.

L'article L. 626-30-2 comporte, par ailleurs, des règles spécifiques à certaines parties affectées. Il renvoie aux articles L. 626-6 et au II de l'article L. 626-20 : l'article L. 626-6 définit les conditions dans lesquelles les administrations financières et les organismes de sécurité sociale peuvent accepter de remettre tout ou partie des dettes du débiteur. Le II de l'article L. 626-20 exclut du plan les créances d'un faible montant.

Pour l'élaboration du projet de plan, sont également prévues des règles propres aux détenteurs de capital des entreprises qui n'atteignent pas certains seuils. En-dessous des seuils définissant, à l'article L. 721-8 du code de commerce, la compétence des tribunaux de commerce spécialisés, les détenteurs de capital des entreprises concernées, s'ils sont affectés par le projet de plan, peuvent apporter une contribution non monétaire à la restructuration (considérant 59 de la directive).

L'article L. 626-30-2 renvoie enfin à des règles définies par décret pour préciser les informations que le projet de plan doit nécessairement comporter (article 8 de la directive) et les modalités de convocation de la ou des classes de détenteurs de capital.

Dans sa nouvelle rédaction l'article L. 626-31 transpose les exigences posées par l'article 10 de la directive pour la validation par le tribunal du plan de restructuration adopté par les classes de parties affectées. Le 4° de l'article L. 626-31 définit, conformément à cette directive, le critère du meilleur intérêt des parties affectées. Le tribunal doit vérifier cette condition si certaines parties affectées ont voté contre le projet de plan. La vérification doit porter sur trois hypothèses : la répartition des actifs du débiteur en liquidation judiciaire, la répartition du prix de cession en application de l'article L. 642-1 et une meilleure solution alternative si le plan n'était pas adopté, ce qui invite à prendre en compte une poursuite d'activité en appliquant un autre scénario que celui de l'adoption du plan de restructuration. Ce dernier point est particulièrement important s'agissant des détenteurs de capital.

L'article L. 626-32 transpose les dispositions de l'article 11 de la directive, relatives à l'application forcée interclasses qui permet, sous certaines conditions, d'imposer un plan à des classes de parties affectées qui ont pourtant voté contre ce projet. En procédure de sauvegarde, l'accord du débiteur est toujours requis pour mettre en œuvre l'application forcée interclasses. Il en va autrement dans le cadre du redressement judiciaire. Le II de cet article permet au tribunal, à la demande du débiteur, de déroger sous certaines conditions à la règle de priorité dite absolue ici transposée, en faisant notamment bénéficier d'un traitement particulier les créances des fournisseurs, les intérêts des détenteurs de capital et les créances nées de la responsabilité délictuelle du débiteur. Pour la transposition, l'ordonnance retient en effet la règle de la priorité absolue (selon laquelle une classe doit être intégralement désintéressée par des moyens identiques ou équivalents pour qu'une classe de rang inférieur puisse avoir droit à un paiement ou conserver un intéressement) et non celle de la priorité relative (selon laquelle une classe doit être traitée de manière plus favorable que toute classe de rang inférieur et de manière aussi favorable que toute classe de même rang). Toutefois, comme le permet la directive, ce choix est nuancé par la possibilité laissée au tribunal de prendre en considération la situation de ces bénéficiaires.

Le considérant 53 de la directive laisse aux Etats membres le choix de décider si, aux fins de l'adoption ou de la validation d'un plan de restructuration, le débiteur dont l'accord est requis doit être considéré comme le représentant légal de la personne morale ou une majorité de détenteurs de capital. C'est le premier terme de l'option qui a été retenu. Les détenteurs de capital, s'ils sont parties affectées, votent en assemblées générales (L. 626-30-2 modifié), ce vote valant vote en classes, et sont soumis aux règles de l'application forcée interclasses, sans toutefois pouvoir en bénéficier (2° du I de l'article L. 626-32), mais sous les importantes réserves précisées au 5° du I de cet article L. 636-32. A ce titre, quatre conditions cumulatives doivent être respectées pour que puisse être imposée une modification du capital, lorsque la ou les classes de détenteurs de capital constituées n'ont pas approuvé le plan.

La première est déterminée par le chiffre d'affaires ou l'effectif ; ces seuils sont fixés par décret en Conseil d'Etat, mais la loi impose des planchers (20 millions d'euros ou 150 salariés.

La deuxième condition dépend, comme le permet la directive 2019/1023, du critère de la valeur du débiteur en tant qu'entreprise en activité : il faut établir que l'on peut raisonnablement supposer, après détermination de cette valeur, que les détenteurs de capital de la ou des classes qui ont voté contre le projet de plan n'auraient droit à aucun paiement ou à ne conserver aucun intéressement si l'ordre de priorité des créanciers pour la répartition des actifs en liquidation judiciaire ou du prix de cession de l'entreprise en application de l'article L. 642-1, était appliqué.

La troisième condition est que si le projet de plan prévoit une augmentation de capital souscrite par apport en numéraire, les actions émises doivent être offertes par préférence aux actionnaires, proportionnellement à la partie du capital représentée par leurs actions.

La quatrième condition est que le plan soumis à l'application forcée interclasses ne doit pas prévoir de cession de tout ou partie des droits de la ou des classes de détenteurs capital qui n'ont pas approuvé le projet de plan.

Si l'ensemble des conditions propres aux détenteurs de capital, qui viennent s'ajouter aux autres conditions prévues par le I de l'article L. 626-32, sont réunies, la décision du tribunal arrêtant un plan avec une modification forcée du capital du débiteur, vaut alors approbation des modifications de la participation au capital ou des droits des détenteurs de capital ou des statuts prévues par le plan, sans qu'il ne soit besoin de réunir à nouveau, suite à leur vote en classes, la ou les assemblée d'associés ou d'actionnaires concernées.

L'article L. 626-33 prévoit que lorsqu'une partie affectée qui a voté contre le plan fait valoir le non-respect du critère du meilleur intérêt des créanciers, condition prévue au 4° de l'article L. 626-31 ou du cinquième ou du dixième alinéa de l'article L. 626-32 relatif à l'application forcée interclasses, le tribunal détermine dans sa décision la valeur de l'entreprise du débiteur (article 14 de la directive).

L'article L. 626-34 renvoie enfin à des dispositions réglementaires pour définir les modalités d'application du système d'adoption du plan de restructuration par les classes de parties affectées. Il s'agit plus particulièrement des modalités de notification de la répartition en classes de parties affectées et du projet de plan, ainsi que des recours, que prévoit aussi l'article 16 de la directive.

Le premier alinéa de l'article L. 661-7 est en outre modifié par l'article 67 de l'ordonnance pour prévoir qu'il ne peut être exercé de tierce-opposition ou de pourvoi en cassation contre les décisions rendues en application du V de l'article L. 626-30.

Les règles relatives à la modification du plan voté

Afin de permettre, le cas échéant, une modification du plan de restructuration arrêté par le tribunal, l'article L. 626-31-1 définit les conditions dans lesquelles une modification substantielle, dans les objectifs et les moyens du plan, peut intervenir. Non prévues par la directive, ces dispositions s'avèrent nécessaires pour en respecter l'esprit. Les classes sont appelées à voter sur cette modification et, sauf si les circonstances le justifient, la répartition en classes et le calcul des voix arrêtés dans le cadre du plan s'appliquent.

La procédure de sauvegarde accélérée

L'article 38 de l'ordonnance constitue, avec son article 37, le socle de transposition du titre II de la directive. L'article 38 porte sur un nouveau chapitre VIII « de la sauvegarde accélérée », composé de deux sections nouvelles : d'une part, la section 1 « de l'ouverture de la procédure » (articles L. 628-1 à L. 628-5) et, d'autre part, la section 2 « des effets de la sauvegarde accélérée » (articles L. 628-6 à L. 628-8), auquel sont applicables les dispositions présentées ci-dessus relatives aux classes de parties affectées qui doivent, dans cette procédure, nécessairement être constituées quelle que soit la taille de l'entreprise.

La nouvelle procédure de sauvegarde accélérée conserve plusieurs caractéristiques de la procédure jusqu'ici en vigueur. L'article L. 628-1 modifié prévoit que la procédure ne peut être ouverte qu'à l'initiative du débiteur, à la suite d'une phase de conciliation préalable obligatoire et sous réserve de justifier d'avoir élaboré un projet de plan tendant à assurer la pérennité de l'entreprise, susceptible de recueillir un soutien suffisamment large des parties affectées.

Il n'y a plus lieu de conserver des dispositions propres à la procédure de sauvegarde financière accélérée mais il demeure possible de limiter les effets de la procédure aux seuls créanciers financiers. Une option en ce sens, ouverte au débiteur, a été introduite au troisième alinéa de l'article L. 628-1. La procédure de sauvegarde accélérée peut être « semi-collective » dès lors que la situation financière et économique de l'entreprise le justifie.

Si les conditions de seuils de la sauvegarde accélérée sont supprimées, les articles L. 628-1 à L. 628-5 ne sont pas modifiés, sauf à l'article L. 628-4 afin d'assurer la coordination avec le nouveau système de vote par classes de parties affectées obligatoirement applicable à cette procédure et à l'article L. 628-5 pour apporter une simple clarification par rapport au texte actuel.

La section 2 « des effets de la sauvegarde accélérée » comporte trois modifications notables.

L'article L. 628-6 prévoit que la procédure ne produit d'effets qu'à l'égard des parties affectées par le projet de plan, ce qui correspondra en pratique aux créanciers appelés à la procédure de conciliation antérieure et, le cas échéant, aux détenteurs de capital.

L'article L. 628-8 modifie la durée de la procédure de sauvegarde accélérée qui est désormais de deux mois, prorogeables par le tribunal pour une durée totale de quatre mois maximum (article 6.9 dernier alinéa de la directive).

Les règles de la sauvegarde non accélérée prévoyant notamment la possibilité pour le tribunal d'imposer sous certaines conditions des délais de paiement aux créanciers, inscrites aux articles L. 626-12 et L. 626-18, ne sont pas applicables.

Les dispositions de coordination

Afin de tirer les conséquences des modifications rendues nécessaires par la transposition de la directive, la procédure de sauvegarde, la procédure de redressement judiciaire et, de façon plus limitée, la procédure de conciliation, sont modifiées, conformément au 8° de l'article 196 de la loi PACTE.

La directive insiste sur l'objectif de célérité des procédures de restructuration (articles 6 et 25 b). Afin de l'appliquer de manière cohérente à la sauvegarde (non accélérée), tout en conservant les caractéristiques actuelles de cette procédure, la durée de la période d'observation est raccourcie à douze mois maximum : la dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 621-3 est supprimée (article 13 de l'ordonnance), de sorte que le procureur de la République ne peut plus, dans cette procédure, demander une prolongation exceptionnelle. Contrairement à ce qui est prévu pour la sauvegarde accélérée, l'éventuel dépassement du délai ne fait toujours pas l'objet de sanction.

Trois autres modifications intéressent la procédure de sauvegarde. La première, inscrite au cinquième alinéa de l'article L. 622-10 du code de commerce (article 17 de l'ordonnance), concerne aussi la procédure de redressement judiciaire ; elle porte sur la conservation du bénéfice des classes de parties affectées déjà constituées, en cas de conversion en procédure de redressement judiciaire. La deuxième modification lisse davantage le profil d'amortissement des plans, lorsque le tribunal peut imposer des délais uniformes de paiement en sauvegarde, ce qui reste possible en dehors des classes de parties affectées : le quatrième alinéa de l'article L. 626-18 est modifié pour prévoir qu'à compter de la sixième année, le montant de chacune des annuités prévues par le plan ne peut être inférieur à 10 % de chacune des créances admises (article 32). Les deux autres conditions déjà prévues, à savoir un premier paiement n'intervenant pas plus tard qu'un an après l'arrêté du plan et un montant de chaque annuité ne pouvant pas être inférieur à 5 % à compter de la troisième année, demeurent applicables. Ce profil d'amortissement, à l'exception de la date du premier paiement, n'est pas applicable en présence d'exploitations agricoles pour lesquelles les plans suivent un profil d'amortissement prenant en compte les spécificités de cette activité. La dernière modification, figurant à l'article L. 626-26, porte sur les modalités de consultation des créanciers en cas de modification substantielle du plan de restructuration lorsque n'est pas applicable l'article L. 626-31-1. Afin d'accélérer la modification du plan, lorsqu'elle est nécessaire, il est prévu que le défaut de réponse des créanciers intéressés vaut acceptation des mesures proposées, sauf s'il s'agit de remises de dettes ou de conversions en titres donnant ou pouvant donner accès au capital. Est ainsi conservée la mesure également introduite de manière temporaire par l'ordonnance n° 2020-596 du 20 mai 2020 (article 36 de l'ordonnance).

Deux autres procédures sont modifiées afin de prendre en compte l'introduction en droit français de ce nouveau cadre de restructuration préventive : la procédure de redressement judiciaire et la procédure de conciliation.

A l'article 39 de l'ordonnance, l'article L. 631-1 du code de commerce est modifié pour appliquer à la procédure de redressement judiciaire le système des classes de parties affectées si les seuils prévus à l'article L. 626-29 sont atteints. En deçà de ces seuils, le juge-commissaire peut, comme en sauvegarde, autoriser la constitution de classes de parties affectées à la demande du débiteur mais également de l'administrateur. La logique qui s'appliquait jusqu'alors pour la constitution des comités de créanciers est conservée. Cette modification met en cohérence les procédures de sauvegarde et de redressement judiciaire, conformément au 7° du I de l'article 196 de la loi PACTE.

Lorsque des classes de parties sont constituées en procédure de redressement judiciaire, deux adaptations sont prévues pour l'application de ce dispositif à l'article L. 631-19 (article 45 de l'ordonnance).

La première, au troisième alinéa du I de l'article L. 631-19, permet à toute partie affectée, et non plus au seul débiteur, de soumettre un projet de plan au vote des classes.

La seconde, au cinquième alinéa du I de l'article L. 631-19, modifie les conditions de mise en œuvre de l'application forcée interclasses. En procédure de redressement judiciaire, l'accord du débiteur n'est plus requis contrairement à ce qui est prévu en procédure de sauvegarde, accélérée ou non accélérée.

L'article L. 631-19-2 (article 47 de l'ordonnance) reste applicable en l'absence de classes de parties affectées constituées volontairement ou obligatoirement. Il est également applicable si le plan soumis aux classes n'est pas adopté, puisqu'il est alors renvoyé aux règles générales d'élaboration et d'arrêté du plan telles que définies par le titre III du livre VI.

Afin de prendre en compte la nécessité pour des petites et moyennes entreprises de bénéficier d'une durée suffisamment longue de période d'observation pour leur permettre de préparer un plan de redressement, lorsque leur situation est particulièrement dégradée, l'article L. 631-7 maintient en son deuxième alinéa, la possibilité pour le procureur de la République de demander la prolongation de la durée de la période d'observation pour une durée maximale de six mois (article 41 de l'ordonnance), portant la durée maximale de la période d'observation à dix-huit mois. Cette disposition demeure donc applicable en redressement judiciaire alors qu'elle ne l'est plus en sauvegarde.

En procédure de conciliation, préalable nécessaire à la procédure de sauvegarde accélérée, la présente ordonnance (article 5) comprend une modification conforme aux objectifs portés par la directive, notamment par son article 6. Elle porte sur la suspension temporaire du droit d'un créancier d'exiger le paiement d'une créance, serait-elle garantie par une sûreté. Toutefois, contrairement à la suspension des poursuites et l'arrêt des mesures d'exécution résultant de l'ouverture d'une procédure collective, la décision du juge intervient sur assignation du créancier, pris individuellement, et la mesure n'a aucun caractère d'automaticité ni collectif. Cette modification assure ainsi la continuité de la mesure introduite dans l'ordonnance n° 2020-596 du 20 mai 2020 mais en modifiant la procédure applicable et en dissociant clairement cette mesure de celle qui résulte d'une procédure de restructuration préventive. Le cinquième alinéa de l'article L. 611-7 du code de commerce est modifié pour permettre au débiteur de solliciter l'application de l'article 1343-5 du code civil et l'octroi de délais de paiement dans la limite de deux années, même en l'absence de mise en demeure ou de poursuite du créancier, lorsque ce dernier n'a pas accepté, dans le délai imparti par le conciliateur, la demande faite par ce dernier de suspendre l'exigibilité de sa créance. En présence de créances non échues, il est également permis au juge de reporter ou échelonner le règlement des créances, dans la limite de la durée de la procédure. Cette évolution ponctuelle rend plus attractif le recours à la conciliation, préalable nécessaire à la demande d'ouverture d'une sauvegarde accélérée, dont on sait que la menace est aussi un argument utile à la négociation conduite par le conciliateur.

II-2. - L'alerte précoce (titre I), la remise de dettes (titre III de la directive), et les mesures visant à accroître l'efficacité des procédures (titre IV)

S'agissant des procédures préventives, le livre VI du code de commerce ne doit être modifié que ponctuellement et la procédure de conciliation n'est pas une procédure de restructuration préventive au sens de la directive. Le code de commerce est également précurseur en matière de détection des difficultés des entreprises et d'alerte précoce de sorte qu'il est déjà ainsi largement conforme avec l'article 3 de cette directive qui impose aux Etats membres de mettre en place des outils d'alerte précoce. Deux modifications des dispositifs en vigueur apparaissent toutefois encore utiles à cet égard. Ces modifications s'inscrivent, par ailleurs, dans les suites à donner au rapport déposé en février 2021 par M. Georges Richelme sur la prévention et la détection des difficultés des entreprises et leur accompagnement.

L'article L. 611-2 du code de commerce est modifié pour permettre au président du tribunal de commerce qui convoque un dirigeant à un entretien de détection-prévention des difficultés d'obtenir, non plus à l'issue mais dès l'envoi de la convocation, la communication de tous renseignements de nature à lui donner une exacte information sur la situation économique et financière du débiteur (article 2 de l'ordonnance).

Un article L. 611-2-2 est créé afin de conserver le principe inscrit à l'article 1er de l'ordonnance n° 2020-596 du 20 mai 2020, permettant l'accélération du dispositif d'alerte des commissaires aux comptes et l'information plus précoce du président du tribunal (article 3 de l'ordonnance).

Le titre III de la directive a trait à la remise de dettes et aux déchéances de l'entrepreneur individuel. L'objectif est de faciliter le rebond des entrepreneurs honnêtes en permettant aux débiteurs personnes physiques insolvables d'avoir accès à au moins une procédure de remise de dettes totale (article 20 de la directive) dans un délai de trois ans maximum (article 21 de la directive), à compter d'un point de départ que les Etats membres peuvent choisir entre plusieurs événements tels la date du jugement d'ouverture ou encore celle de la décision arrêtant un plan.

Il existe déjà en droit français plusieurs procédures permettant aux entrepreneurs individuels de bénéficier de remises de dettes rapides. Il s'agit de la procédure de rétablissement professionnel, d'une durée de quatre mois prorogeable un mois et de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée d'une durée de six à douze mois, prorogeable trois mois.

Afin d'anticiper les difficultés économiques découlant de l'épidémie de covid-19, l'article 6 de l'ordonnance n° 2020-596 du 20 mai 2020 a temporairement élargi le champ d'application de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée en permettant à toute personne physique d'avoir accès à cette procédure sous réserve que l'actif du débiteur ne comprenne pas de bien immobilier. Les conditions de seuils prévues au premier alinéa de l'article L. 641-2 du code de commerce sont ainsi écartées en présence d'un débiteur personne physique. La présente ordonnance pérennise cette mesure (article 52).

En complément, outre le rehaussement du seuil de l'actif déclaré par le débiteur de 5 000 euros à 15 000 euros, prévu par l'article 6 de l'ordonnance n° 2020-596 du 20 mai 2020 qu'il est prévu de pérenniser par voie réglementaire, la procédure de rétablissement professionnel est également modifiée. Afin d'élargir le champ d'application de cette procédure, il est désormais prévu que les biens que la loi déclare insaisissables de droit ne sont pas pris en compte pour déterminer la valeur de l'actif de référence qui en conditionne l'ouverture (article 64 de l'ordonnance). La résidence principale du débiteur, insaisissable de plein droit en application de l'article L. 526-1 du code de commerce, ne peut ainsi, notamment, être prise compte pour la détermination de la valeur de l'actif du débiteur. Cette disposition se justifie aussi par l'une des raisons d'être de ce rétablissement professionnel, qui est la maîtrise des frais de procédure, dont la nécessité est affirmée également par la directive (titres IV et V de la directive).

Le droit français est, également, largement conforme au titre IV de la directive en ce qu'il prévoit que les membres de l'autorité judiciaire doivent recevoir une formation appropriée et disposer de l'expertise nécessaire eu égard à leurs responsabilités (article 25 de la directive) et invite les Etats membres à appliquer les mêmes exigences pour les praticiens dans les procédures de restructuration, d'insolvabilité et de remise de dette et à mettre en place des règles définissant le statut de ces praticiens, ainsi que leur contrôle et rémunération (articles 26 et 27 de la directive).

L'article 73 prévoit que l'ordonnance entre en vigueur le 1er octobre 2021 mais que ses dispositions ne sont pas applicables aux procédures en cours au jour de son entrée en vigueur. Il est dérogé à cette date d'entrée en vigueur pour l'article 27 qui entre en vigueur le 1er janvier 2022 afin de prendre en compte la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance portant réforme du droit des sûretés. Il y est également dérogé pour faciliter le financement de la modification d'un plan arrêté par le tribunal dans le cadre d'une procédure ouverte avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2020-596 du 20 mai 2020, cette dernière comportant déjà des dispositions instituant un privilège dans ce cadre pour les procédures ouvertes entre la date de son entrée en vigueur et celle de l'entrée en vigueur de la présente ordonnance.

L'absence d'application aux procédures en cours au jour de l'entrée en vigueur de l'ordonnance ne fait pas obstacle, par ailleurs, à l'ouverture d'une procédure de sauvegarde accélérée avec la constitution obligatoire de classes de parties affectées même si la procédure de conciliation qui la précède a été ouverte avant l'entrée en vigueur de la présence ordonnance. Le cadre de restructuration préventive transposé pourra ainsi être rapidement mis en œuvre.

Tel est l'objet de la présente ordonnance que nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de notre profond respect.